in: Le fusil brisé, Septembre 2008, No. 79

Confronter l’alliance guerrière à des manifestations massives


von: Tobias Pflüger | Veröffentlicht am: 1. Januar 2009

Drucken

Hier finden sich ähnliche Artikel

Malgré toutes les prévisions quant à sa dissolution imminente, l’Otan a développé ces dernières années une effrayante dynamique belliqueuse. Stratégie de la première frappe nucléaire, escalade des opérations contre-insurrectionnelles en Afghanistan, intensification de la coopération avec l’Union européenne en passant par une transformation institutionnelle: il y a plus de raisons que nécessaires pour s’opposer, par des manifestations massives, au 60e anniversaire de l’alliance guerrière qui sera célébré les 3 et 4 avril 2009 à Kehl et à Strasbourg,

Stratégie de la première frappe nucléaire et bouclier de défense anti-missile

Dans un document d’opinion rédigé par cinq éminents stratèges de l’Otan et publié début 2008 («Vers une stratégie d’ensemble pour un monde incertain»), la stratégie de la première frappe nucléaire est ouvertement promue. «L’utilisation préventive de l’arme nucléaire doit demeurer un moyen ultime pour empêcher l’utilisation d’armes de destruction massive».

De telles frappes préventives devraient aussi et particulièrement être possibles contre des États qui ne sont pas eux-mêmes en possession de l’arme nucléaire, tel l’Iran.

De par la menace nucléaire, le bouclier ad hoc se doit d’être développé. Il fut décidé lors du sommet de Bucarest, en avril 2007, d’intensifier la préparation d’un bouclier de défense antimissiles étendu. Ce bouclier serait créé en plus des installations américaines prévues en Pologne et en République Tchèque. La décision s’appuie sur une étude secrète de faisabilité que l’Otan a contractée auprès de plusieurs entreprises d’armement. D’après les estimations de ces entreprises, son coût total serait de 20 milliards d’euros. L’Institut allemand pour les affaires internationales et les questions de sécurité (SWP), qui conseille le gouvernement allemand, estime que ce projet déstabilisant coûtera le double.

L’Afghanistan: champ expérimental pour les opérations civilo-militaires de contre insurrection

L’opération militaire de l’Otan en Afghanistan a mis en mouvement une cruelle escalade. Depuis que l’USAF et troupes de l’Otan agissent de plus en plus offensivement, les échauffourées avec usage d’armes et les morts parmi la population afghane croissent de manière tragique.

Sous occupation militaire, ont été créées les structures d’une économie libérale de marché qui a totalement échoué quant à réduire la pauvreté manifeste en Afghanistan. Selon le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), la situation humanitaire a empiré depuis que les opérations de l’Otan ont débutées: 61% de la population souffre de malnutrition chronique, 65% n’a pas l’accès à l’eau potable. Quant au droit des femmes, les améliorations sont minimes d’après le PNUD.

L’occupation de l’Afghanistan par l’Otan est le problème et non la solution pour ce pays opprimé. De ce fait, un retrait immédiat d’Afghanistan est plus que nécessaire. Au lieu de cela, l’Otan veut y envoyer plus de troupes. Aussi le gouvernement allemand a décidé de «poser des mesures plus vigoureuses au cœur » comme l’a annoncé le ministre de la Défense en mars 2008.

À travers la coopération civilo-militaire telle qu’elle est pratiquée en Afghanistan, même l’aide au développement est intégrée à l’effort de guerre de l’Otan. Caritas International a d’ailleurs critiqué l’Otan en juin 2008, indiquant que «la distribution des fonds de l’aide ne se fait pas en fonction des nécessités réelles mais est orientée selon les besoin de la contre insurrection». Au sommet de l’Otan à Bucarest il fut décidé – mais maintenu au secret – de mettre en place un «plan d’action», qui fera généralement de la contre insurrection civilo-militaire le centre d’intérêt des missions actuelles et futures de l’Otan.

Frères d’âme: l’intensification de la coopération entre l’Otan et l’Union européenne

Peu après sa prise de fonction, le président français Nicolas Sarkozy fraîchement élu a entamé auprès de l’Otan une réelle offensive de charme. Il a annoncé la complète réintégration de la France au sein des institutions militaires de l’Otan dont elle fut absente pendant 40 ans. Les deux organisations coopèrent déjà étroitement, dans le cadre de l’accord «Berlin plus» par exemple, qui permet à l’Union européenne d’accéder à des ressources de l’Otan pour ses opérations propres. Mais la France qui préside le Conseil de l’Union européenne jusqu’à la fin 2008, va maintenant intensifier la coopération à tous les niveaux. Pour cela, l’Institut allemand pour les affaires internationales et les questions de sécurité (SWP) propose un renforcement des liens entre les deux organisations par la création d’une «capacité de préparation et de conduite d’opérations civilo-militaires au sein de l’Otan» qui serait à même de «coordonner les capacités civiles et militaires de l’Union européenne et les capacités militaires de l’Otan en un seul lieu … [S]ous l’égide d’un «Berlin plus inversé», l’Otan disposerait de la possibilité de recourir aux capacités civiles de l’Union européenne».

Renouvellement des institutions

À l’occasion de son 60e anniversaire en 2009, l’Otan veut signer ou au moins mettre en mouvement un nouveau concept stratégique. Le document d’opinion «Vers une stratégie d’ensemble pour un monde incertain», cité auparavant, propose un large spectre de mesures, dont la fin de la nécessité du mandat de l’ONU pour les futures guerres de l’Otan. Une autre requête qui ressort est que l’Alliance devrait dans le futur «abandonner le principe du consensus à tous les niveaux inférieurs au Conseil de l’Otan, et introduire la règle du vote à la majorité simple pour le comité et les groupes de travail». En outre, les auteurs proposent que les pays qui ne souhaitent pas être engagés dans une mission n’aient, dans le futur, aucun droit à participer aux décisions quant à cette mission, seuls ceux prenant part au combat le pourraient alors: «La contribution possible pour chaque nation en moyens comme en forces a toujours été laissée à la discrétion de chaque nation. Mais les nations ne contribuant pas en combattant ne devraient pas non plus avoir de mots à dire quant à la conduite des opérations militaires. Nous proposons de ce fait … que seules les nations participant à une mission – par exemple: engageant des forces armées dans une opération militaire – puissent décider du processus de l’opération.» La part de ces requêtes et d’autres de ce type, dans le Nouveau concept stratégique est actuellement inconnue, mais celles-ci joueront un rôle important dans les débats à venir.

60e anniversaire de l’Otan: appel à manifester à Strasbourg et Kehl

L’Otan va – vraisemblablement – célébrer son 60e anniversaire les 3 et 4 avril 2009 à Kehl et à Strasbourg. C’est aussi une invitation pour nous, mouvements pacifistes et antiguerre. L’Otan représente la mise en œuvre par l’armée des intérêts occidentaux, et est de plus en plus une alliance pour guerroyer. Nous devrions commencer une campagne pour délégitimer l’Otan, cette organisation superflue qui devrait être dissoute. Un point d’orgue de cette campagne pourrait être les actions internationales s’opposant au sommet de l’Otan, à Kehl et à Strasbourg, lequel marquera son 60e anniversaire.