IMI-Analyse 2006/027b

Troupes de l'ONU au Liban: La guerre au Liban et le silence des complices


von: Claudia Haydt | Veröffentlicht am: 26. November 2006

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La responsabilité de l'Europe pour le conflit au Proche-Orient est multiple. En Allemagne la participation au contingent de troupes de l'ONU au Liban (UNIFIL II) est significative de cette implication européenne.

Les émotions au service du réarmement

Le 20 septembre 2006, une majorité des députés du Bundestag allemand votait pour la participation de 2'400 soldats allemands au plus à la mission des troupes de l'ONU au Liban (UNIFIL II). Le lendemain deux frégates, quatre vedettes rapides et deux navires de ravitaillement avec un millier de marins et soldats à bord quittaient le port de Wilhelmshaven pour les côtes libanaises. Les médias montraient surtout des images touchantes des proches des soldats, femmes et enfants restés à quai, ainsi que les déclarations de la chancelière Mme Merkel expliquant qu'avec l'augmentation des engagements, le budget affecté à la Bundeswehr ne suffisait plus.

La question de savoir s'il est nécessaire ou même utile d'envoyer des soldats allemands partout dans le monde est très peu débattue. Dans le cadre de la résolution 1701 du Conseil de sécurité de l'ONU, les soldats allemands doivent contribuer au contrôle des frontières maritimes. Jusqu'à présent, la contrebande d'armes s'est déroulée surtout par voie terrestre et il est très probable que cela continue ainsi. De plus, il sera difficile d'empêcher ce trafic tant que les acteurs impliqués jouiront du soutien de la population. Les forces militantes parviennent à faire passer des fusées Katyusha même dans la Bande de Gaza, pourtant verrouillée par l'armée israélienne. Heureusement, jusqu'à présent les stratégies pour empêcher la contrebande d'armes au Liban ne prévoient pas de scénarios qui ressembleraient à la situation de Gaza. Dans une logique militaire, la présence allemande devant les côtes libanaises ne fait pas beaucoup de sens. Par contre, cet engagement de la Bundeswehr au Proche-Orient fait complètement tomber les tabous qui pouvaient encore freiner les engagements militaires de l'Allemagne. Après cet engagement, il ne pourra plus y avoir aucune objection, pour aucune raison morale que ce soit, au déploiement de troupes allemandes dans n'importe quelle région du monde.

Neutralité?

La participation allemande à la mission de l'UNIFIL et en particulier sa motivation posent dans la région la question de la neutralité de l'engagement. Dans une interview au quotidien espagnol El Pais, le président Syrien Assad déclarait que „En expliquant que leur engagement avait pour objectif la protection d'Israël, les Allemands ont eux-mêmes disqualifié leur mission“. Evidemment, Assad a des craintes pour l'influence syrienne sur la politique intérieure et l'économie libanaise. Les contrôles aux frontières risquent fort d'affecter négativement les échanges de marchandises avec la Syrie. Le fait que la France, l'Italie et l'Allemagne soient à la fois les principaux fournisseurs de troupes à l'UNIFIL et aussi parmi les principaux partenaires commerciaux ne fait que diminuer la crédibilité de leur engagement. Le fait d'avoir trop longtemps attendu, pendant les semaines de guerre, pour demander un cessez-le-feu immédiat reste toutefois la raison principale du discrédit de ces pays.

Le silence rend complices

Pourquoi, au vu des énormes souffrances infligées aux populations civiles au Liban et en Israël, la plupart des Etats occidentaux ont-ils attendu tellement longtemps avant de demander un cessez-le feu immédiat aux deux parties en conflit?

Un élément-clé de la réponse est certainement à chercher dans la politique interventionniste dans laquelle les Etats-Unis et plusieurs Etats de l'UE se sont engagés. La „logique“ de la „guerre contre le terrorisme“, avec son exercice de puissance brutale et ignorante des dispositions du droit international, ne se différencie pas foncièrement des procédés de l'armée israélienne. De même la conduite de la guerre est semblable. Le gouvernement israélien, tout comme l' „alliance anti-terreur“ estiment que les interventions militaires et l'utilisation de l'aviation constituent des moyens adéquats pour rétablir la „sécurité“.

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Le gouvernement des Etats-Unis, mais aussi les responsables à Londres et Berlin espéraient plus ou moins ouvertement que l'armée israélienne allait „résoudre le problème“ posé par l'existence du Hezbollah au Liban. Au début du mois d'août, après trois semaines de guerre, on affirmait encore qu'un „cessez-le-feu durable“ ne pouvait être atteint qu'après la neutralisation du Hezbollah. „Le gouvernement fédéral [allemand] continue à donner la priorité à une solution durable au Proche-Orient, plutôt qu'à un cessez-le feu immédiat.“ (afp/dpa 2.8.2006) Cette position ne saurait se comprendre uniquement dans le cadre de la guerre au Liban. Il s'agissait probablement d'une tentative, avec l'aide de l'armée israélienne, d'isoler l'Iran.

Exportations d'armes

Malheureusement les Etats occidentaux – l'Allemagne n'est pas des moindres – continuent leurs livraisons d'armes dans la région. La vente de deux sous-marins allemands et la livraison d'avions Eurofighter à l'Arabie Saoudite sont deux exemples récents de la spirale de l'armement, continuellement alimentée au Proche-Orient par l'extérieur. Le 27 juillet l'émission TV „Monitor“ montrait que les armes allemandes trouvaient leur chemin vers toutes les parties au conflit. Le moteur du char „Merkava“ en dotation à l'armée israélienne est de fabrication allemande et le canon de 120 mm du même char a été conçu en Allemagne. Mais aussi les fusées antichar „Milan“ qui constituaient la principale menace pour ces chars sont de fabrication franco-allemande. Entre 1999 et 2004, l'Allemagne a exporté des armements pour au moins 1,6 milliards d'Euros vers le Proche-Orient.

En raison de la grande responsabilité morale pour l'origine et la poursuite des guerres et des crises au Proche-Orient, les troupes allemandes sont le moyen le moins indiqué pour contribuer à une désescalade. Un vaste programme de reconstruction civile pour toutes les victimes de la guerre du Liban pourrait constituer un pas essentiel vers une solution. A condition de dépasser l'aide promise par la conférence des donateurs internationaux et de parvenir directement aux populations concernées. Jusqu'à présent, les personnes au sud du Liban ne sont aidées que par le Hezbollah, ce qui ne facilite en tout cas pas son affaiblissement.

C'est pourquoi il faut une politique crédible, qui délaisse les doubles standards. Les concepts de sécurité et les critères de respect des droits humains ne doivent plus être appliqués de manière sélective. Aussi la protestation ne doit pas se diriger uniquement contre la politique militaire israélienne, mais contre la politique militaire et anti-terroriste occidentale.

* Claudia Haydt est chercheuse en religions et sociologue. Elle est membre au comité de la Informationsstelle Militarisierung (IMI) e.V. de Tübingen. Le texte publié est la traduction (t.s.) d'un extrait d'un article paru dans la revue Ausdruck du 3 octobre 2006.

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